Chapitre 3
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Fleur Sauvage regarda sa sœur et celle-ci lui fit un signe de tête, de manière à lui faire comprendre qu'elle se chargeait de Croc de Jaguar. La chatte tachetée n'attendit pas plus et s'élança en avant.
« Que se passe-t-il ici ? »
À l'appel de Fleur Sauvage, Aile de Chouette se tourna vers elle avec de grands yeux, semblables a deux petites lunes.
« Nous avons entendu un raffut infernal de l'autre côté... »
D'un mouvement de la queue, elle désigna un bosquet d'ajonc un peu plus loin devant.
« Avant même que nous nous puissions poser plus de questions, Étoile de Tempête a ordonné à tout les guerriers de le suivre et a dit au reste de se mettre à couvert. Je dois rester ici pour protéger les reines et les apprentis, vas-y vite toi ! Je crois qu'il se passe quelque chose de grave. »
Fleur Sauvage fila un regard vers le reste du Clan composé des plus faibles. Un instant son regard s'arrêta sur le gros ventre de Feuille de Pin, couvert de tendresse par le regard protecteur de son compagnon, malade, qui venait de la rejoindre.
« Prends bien soins d'eux. »
Aussitôt son dernier mot prononcé, elle fila aussi vite que ses pattes le purent en direction du bosquet que sa mère venait de lui indiquer. Les branches étaient craquées et pliées, formant un tunnel, le groupe était passé par là. Sans hésiter et quitte à se blesser avec les épines tranchantes, elle s'engouffra dans l'amas de ronce.
Quelques bouts de sa fourrure s'arrachèrent de son pelage tacheté durant la traversée, heureusement le chemin tracé limita les dégâts. À mi-chemin, une odeur acre vint lui brûler la truffe, une odeur qu'elle avait déjà sentit sur son ancien territoire et qui lui avait coûté une cicatrice sur l'oreille gauche. Aussitôt, ses muscles se bandèrent et ses griffes sortirent. La chatte fit un bon pour franchir le dernier obstacle et dévisagea en contrebas un combat acharné. Deux énormes renards dévoilèrent leurs rangées de dents acérées à chaque bout de fourrure qui passait sous leurs museaux. Le sol de la forêt était paré de taches pourpres, ici et là, témoignant du ravage. Le Clan de la Rivière et le Clan du Vent étaient là, le Clan du Tonnerre aussi, et tous s'étaient unis contre les adversaires. Dans le combat, Fleur Sauvage crut revoir la destruction de leur ancien campement par les loups, ce combat avait d'ailleurs coûté la vie à plusieurs de ses congénères...
Sans réfléchir plus longtemps, Fleur Sauvage s'élança en griffant la terre et bondit sur l'échine d'un des deux prédateur, se mêlant aux coups de ses camarades de tout clan. Le renard glapit en reculant puis pivota pour attraper un matou gris qui tentait de lui mordre la patte arrière. Fleur Sauvage se précipita de bondit au visage de la bête pour tenter de l'aveugler et l'empêcher de faire une nouvelle victime. Le renard l'esquiva en échange de son attaque. Après un pas en arrière, le prédateur se fit de nouveau prendre d'assaut par des guerriers du Clan du Vent. Celui-ci saignait désormais à de multiples endroits et ne tarderait pas à être repoussé.
Fleur Sauvage allait de nouveau attaquer lorsque du coin de l'œil, elle perçut Étoile Lunaire tenter de ramasser un chaton du Clan de la Rivière, blessé et laissé pour mort sur le champ de bataille. Une deuxième silhouette rousse d'un renard fondit sur la meneuse du Clan du Vent, et un instant plus tard : l'attrapa aux cotes.
Fleur Sauvage dévia sa direction et se précipita vers la chatte en détresse qui émettait des cris de douleur tandis que le prédateur resserrait sa puissante mâchoire en la secouant frénétiquement de droite à gauche. Alors que la guerrière n'était plus qu'à une longueur de queue du drame, une ombre grise passa devant la chatte et gronda comme le tonnerre. Étoile de Tempête venait de bondir à la gorge du renard et laboura de coups de crocs et de griffes la chaire de celui-ci, comme si sa propre vie en dépendait. La guerrière rousse et blanche se précipita à sa suite pour le soutenir et attrapa la patte avant du renard pour tenter d'en déchirer la peau avec toute la force qui lui restait. La pauvre bête recula en relâchant de son emprise la cheffe, blessée, qui s'effondra aussitôt au sol, ensanglantée. La bête se secoua avant de prendre la fuite dans un buisson.
Fleur Sauvage bondit sur ses pattes et cracha avec fureur vers la direction qu'avait prit le renard. Ses oreilles lui brûlaient, tant elle aurait voulut lui faire la peau. En se retournant, elle put voir que le chaton brun, sauvé par Étoile Lunaire, était pris en charge par Poitrail Brun, le guérisseur du Clan de la Rivière. Celui-ci ordonna d'aller trouver des toiles d'araignées pour arrêter les saignements. Une jeune femelle sombre, sûrement guerrière depuis peu accourut prés de lui puis détala, suivit d'un matou blanc comme neige, tout deux appartenant au Clan de la Rivière. Au tunnel, ils laissèrent quelques touffes de poils dans les ronces.
Fleur Sauvage voulut s'approcher du petit lorsqu'un cri à fendre les cœurs résonna dans la plaine. Toutes les têtes se tournèrent vers celui-ci. Fleur Sauvage, prise d'une inquiétude soudaine, se rua vers l'appelle au secours, aussitôt imitée par Cœur Argenté, son père.
Les deux membres du Clan du Tonnerre se stoppèrent. Lune Verte, guerrière du Clan du Tonnerre, était effondrée devant un corps de félin immobile. En s'approchant un peu plus, Fleur Sauvage reconnut l'épaisse fourrure gris d'un camarade de clan: Plume de Silex. Ce-dernier respirait faiblement et miaulait d'une voix faible. C'était le frère de Cœur Argenté et de Lune Verte. Celui-ci avait assisté à la bataille contre les loups et avait prouvé qu'il savait défendre son clan en sauvant son chef d'une bête féroce. Le matou gris souleva soudainement la tête, tremblant de tout ses membres.
« Où ... Où est-elle ..?
-P-Plume de Silex ? bégaya Cœur Argenté avant d'enfouir sa truffe dans le pelage de son frère. Ne t'en fais pas, la bête s'est enfuie. Tu va t'en sortir maintenant ; Queue de Serpent va arriver d'un instant à l'autre. »
Sa sœur, Lune Verte, échangea un regard triste à Cœur Argenté qui voulait en dire long. Elle s'abaissa à sa hauteur et, à son tour, enfuit son museau dans le poil de Plume de Silex. Aile de Chouette tendit son cou et approcha du matou gris. Elle fit un mouvement de tête horrifié lorsqu'elle vit de qui il s'agissait. La chatte avait passé son enfance en compagnie du matou. Plume de Silex rouvrit les yeux et la fixa avec un regard inquiet. La chatte avança dans la foule, bousculant Fleur Sauvage pour se coucher près du blessé puis lui murmura des mots apaisants. Cependant, Plume de Silex ne voulait rien entendre et dans un dernier soupir chuchota à mi-voix.
« Je ... Je suis désolé Aile de Chouette... Je m'en veux tellement... »
Le silence qui suivit ses paroles se fit pesant, chacun baissait la tête, évitant de croiser le regard vide du défunt. Aile de Chouette lui chuchota quelque chose si doucement que Fleur Sauvage ne put l'entendre puis elle baissa la tête, sa truffe effleurant l'herbe pourpre. Cœur Argenté se colla contre sa compagne et la rassura en enroulant sa queue contre la sienne.
Fleur Sauvage eut le cœur serré. En regardant autour d'elle, elle ne parvint pas à voir la fourrure de son chef.
« Où est Étoile de Tempête ? » demanda-t-elle à mi-voix au chat le plus proche d'elle, un petit apprenti blanc.
Ce-dernier leva péniblement ses yeux triste sur elle puis, du bout de la queue, indiqua une direction éloignée. En suivant du regard, Fleur Sauvage vit une scène qui lui hérissa les poils jusqu'au bout de la queue. Étoile de Tempête était accroupi près de la meneuse du Clan du Vent, léchant doucement son poil. Étoile Lunaire était amochée, mais en état de voyager, ses plaies ne semblaient pas graves.
La colère brûla dans les yeux verts de la rouquine. Comment son propre chef pouvait prêter plus d'attention à l'état d'un chef ennemi plutôt qu'à la mort de l'un de ses plus fidèles guerriers ?! Fleur Sauvage cracha de dégoût et se tourna vers le corps décharné de Plume de Silex. Elle se glissa contre sa mère et sa sœur, Lune Brillante, nouvellement arrivée. Au bout d'un certain temps, elle sentit sa mère se décoller et une fourrure froide se glisser à son côté. En roulant un peu des yeux, Fleur Sauvage reconnut la couleur rousse de Plume de Flamme. Elle lisait dans ses yeux une profonde peine. Le lieutenant avait sans doute bien plus conscience de ses priorités que leur chef.
De nombreuses minutes passèrent avant que les chats ne se relèvent. Quelques guerriers adverses vinrent rendre hommage au matou gris, dont les chefs de chaque clan. Étoile de Tempête fut le dernier à venir. Son regard ne trahissait rien d'autre qu'une inquiétude anxieuse. Une question germa dans la tête de Fleur Sauvage. Et s'il s'agissait d'Étoile Lunaire... Aurais-tu été plus triste, Étoile de Tempête ? La chatte rousse et blanche s'obligea à effacer ces images de sa mémoire et trottina vers ses camarades de clan.
Alors qu'elle allait s'asseoir à l'ombre d'un arbre, Truffe d'Épine, un guerrier de son clan, vint à sa rencontre.
« Fleur Sauvage ! miaula-t-il. Plume de Flamme m'a demandé de vérifier l'état des guerriers de notre clan, tu veux m'accompagner ? »
La chatte blanche hocha la tête et suivit son camarade à travers la foule de félins. Ils inspectèrent d'abord les reines, les chatons, les anciens, les apprentis puis les guerriers. Heureusement, aucun d'entre eux ne semblait réellement touché. Désormais, tout les chats de chaque clan étaient réunis, et les trois guérisseurs semblaient débordés. Fleur Sauvage poussa un soupir de soulagement. Du coin de l'œil, elle put voir Poitrail Brun appliquer tout un tas de toile d'araignée sur le pauvre chaton qui avait subit la morsure du renard. Le petit se débattait férocement, tout en gémissant. Une reine était assise non loin. Elle semblait avoir souffert et l'inquiétude se lisait sur son visage.
Fleur Sauvage suivit son camarade pour inspecter plus loin et son regard croisa soudain celui d'Étoile de Diamant, la cheffe du Clan de la Rivière. Fleur Sauvage la foudroya d'un regard glacial. La meneuse la considéra, puis se détourna sans plus d'attention. Décidément sa fierté dépassait de loin sa compassion.
Fleur Sauvage fulmina et bondit jusqu'à elle.
« Non mais pour qui te prends-tu ? C'est toi qui as déclenché tout ça et tu oses me tourner le dos ainsi ? Des chats sont morts aujourd'hui par ta faute: ais la noblesse d'esprit de l'assumer ! »
La chef balaya le sol de sa queue blanche soignée et tourna vigoureusement la tête vers Fleur Sauvage. Son regard bleu était pénétrant. Aussitôt Fleur Sauvage regretta ses mots. Comment avait-elle put s'adresser ainsi à un cheffe de clan ?
« Je crois n'avoir pas été claire avec toi la dernière fois. Fulmina-elle en sortant les griffes. Ce n'est pas ma responsabilité si le Clan du Tonnerre est trop lent. Ou si faible que ses guerriers succombent à la moindre escarmouche. Si tu veux te plaindre va voir les anciens, les vôtres n'ont que ça à faire... »
Cela en était trop. Fleur Sauvage oublia ses remords en un instant et bondit sur la chatte, toutes griffes dehors. La cheffe glissa sur le sol et esquiva la guerrière. Fleur Sauvage ripa et se précipita à l'attaque de nouveau, mais cette fois-ci, Étoile de Diamant s'abaissa au sol, laissant la chatte lui passer par dessus, puis leva ses épaules et la tête pour faire basculer la guerrière en l'air en la frappant de plein fouet. Fleur Sauvage eut le souffle coupé. Elle s'écroula plus loin, et roula dans la poussière.
« Ahah ! Tu penses vraiment faire le poids contre moi ? Franchement tu es pathétique. »
Fleur Sauvage grogna et se jura de faire ravaler ses mots à cette langue de vipère. La chatte leva tête, prête à en découdre. Un frisson glacial lui parcourut toute l'échine lorsqu'elle découvrit que ses camarades de clan avaient encerclé le combat, béas. Dans la foule, Fleur Sauvage reconnut le lieutenant ; la dévisageant avec colère. À côté, Aile de Chouette semblait horrifiée par ce qu'elle venait de voir. Fleur Sauvage fut plus honteuse que jamais, elle aurait aimé disparaître sous terre. Les yeux terrifiés par tout les regards posés sur elle, elle resta immobile, tétanisée par la peur des représailles. La cheffe adverse cracha de mépris puis lui tourna le dos nonchalamment. Un instant plus tard, la foule se divisa, le combat n'irait de toute évidence pas plus loin. Fleur Sauvage regarda ses pattes, incapable d'affronter le regard de ses camarades de clan. Elle, qui depuis le début se battait pour que les clans agissent ensemble, venait d'attaquer la cheffe du clan de la Rivière. C'était honteux de sa part et elle le savait.
Une voix s'éleva soudain du bois.
« Écoutez moi tous. Nous avons décidé de rester ici pour la nuit. Nous avons tous besoin de repos et cet endroit me semble parfait maintenant que le danger a été écarté. Je crois que la fatigue nous rend tous plus irritable. Profitez de cette nuit pour reprendre vos esprits. » Étoile de Tempête appuya ses derniers mots en foudroyant du regard Fleur Sauvage, qui coucha les oreilles aussitôt tant elle avait honte. Un peu plus bas, il continua.
« Étoile Lunaire étant blessée, j'invite Queue de Serpent à me rejoindre. Tout de suite. »
Aussitôt ses mots prononcés, le guérisseur accourut, un paquet d'herbe en bouche. Le chef lui désigna du museau la cheffe blessée. " Non... ça va allez je t'assure." Entendit Fleur Sauvage. Étoile Lunaire venait de rejoindre les deux matous du Clan du Tonnerre en boitillant d'un pas gauche.
« Tu as besoin de soins, laisse mon guérisseur t'aider. »
Après un regard que Fleur Sauvage ne put décrire, la chatte s'allongea au sol et se laissa soigner sous le regard protecteur du chef cendré.
« Dis donc, tu sais te faire remarquer quand il le faut. »
Fleur Sauvage eut un sursaut et tourna la tête. Le matou noir sombre lui faisait face, un sourire moqueur en coin de bouche.
« Je ne suis pas fière, Cœur de Jais. Ronchonna la guerrière en lui tournant le dos.
- Tu as de quoi ! Je suis sûr que le chef le retiendra longtemps. En pleine trêve en plus, non mais qu'est ce qui t'as pris ? »
La chatte le considéra avec fureur. Elle n'appréciait guère que l'on lui fasse des remarques de ce genre, surtout quand on s'appelait "Cœur de Jais". Elle allait rétorquer avec vigueur mais l'air sérieux du chat la fit hésiter. Finalement, la naïveté du matou la fit changer d'humeur. Elle soupira puis se retourna.
« Je ne sais pas... Je ne comprends pas sa façon de réfléchir. Je sais qu'Étoile de Diamant est une noble cheffe, mais à mon sens elle ne prend pas les bonnes décisions. Depuis le début de ce voyage elle dénigre totalement le Clan du Tonnerre juste sous prétexte que notre territoire a été le moins affecté par l'attaque. C'est une cheffe jalouse qui ne pense qu'au bien de son clan et non à celui de tous. Sa fierté la mènera à sa perte.
- Tu as sans doute raison. Mais on ne s'attaque pas à une cheffe de Clan comme ça... » Le matou se pencha jusqu'à son oreille pour lui chuchoter : « Surtout sans lui faire aucun dégât. Tu aurais du lui viser l'oreille, ça lui aurait fait un beau souvenir... »
Fleur Sauvage émit un ronron amusé. Finalement, la présence du matou noir ne lui était pas si insupportable que ça. Elle se surprit même à l'apprécier un instant.
« Tu m'accompagnes chasser avant la nuit ? Ça te changerai les idées. »
La guerrière accepta sans hésiter. Elle était si fatiguée qu'un bon repas ne lui ferait pas de mal. La chatte se leva et suivit le matou à quelques pas de distance. Du coin de l'œil, elle aperçut Croc de Jaguar un peu à l'écart du groupe, enroulé contre sa compagne, le bout du museau posé sur le ventre rond de la future mère. Elle faillit aller les séparer pour ne pas qu'il la contamine mais préféra laisser cette tâche à Queue de Serpent, après tout, les déranger dans un si beau moment briserait sûrement leur amitié.
Ils croisèrent plusieurs patrouilles de chasses en chemin, d'ici un jour l'endroit serait totalement dépouillé. Fleur Sauvage suivit Cœur de Jais jusqu'à ce qu'ils soient assez éloignés du campement pour trouver de quoi se mettre sous la dent.
Ici, les odeurs de renards se sentaient encore. Le matou trapu leva soudain la queue et fit toutes sortes de signes à la chatte. D'abord elle ne comprit rien, puis en suivant son regard, elle vit qu'il désignait une pie, occupée à picorer un peu plus loin. Bien entendu, pour ce genre de proies, Fleur Sauvage avait une bien meilleure carrure que Cœur de Jais afin d'être discrète et rapide. La chatte glissa jusqu'à sa proie en écartant les grandes herbes sur son passage. Arrivée assez près, elle fit un rapide signe de queue à son compagnon pour qu'il reste silencieux. Après un instant, elle prit appui sur ses muscles et bondit sur l'oiseau en visant les épaules. La bête se mit soudain à battre des ailes et à jacasser. La chatte planta ses griffes dans les plumes et commença à décoller avec la pie sans parvenir à la maintenir au sol. Fleur Sauvage glissait tandis que l'oiseau prenait de la hauteur. Soudain, celui-ci s'effondra au sol après un impact violent. Cœur de Jais venait de lui bondir dessus. Avec son poids important, le matou ne mit qu'un instant avant de le clouer au sol. Un coup de croc plus tard, la tête de la proie pendait dans la mâchoire du guerrier.
Fleur Sauvage bondit sur ses pattes avec une énergie débordante.
« Beau coup de patte ! Sans toi je me serais envolée dans le ciel ...
- Et tu te serais écrasée plus loin. Fini-t-il d'un ton sec. Il tourna la tête vers elle et lui fit une grimace. Celle-ci lui répondit par un coup d'épaule bien placé qui le fit presque basculer.
- Je pense qu'une seule proie ne suffira pas... Tout le monde à besoin de manger. Retourne au camp, je me charge de trouver autre chose. Conclut la femelle.
- Comme tu voudras. »
Sur ces mots, le matou saisit sa proie par le coup et l'emporta sur le chemin du retour.
Alors que Fleur Sauvage s'apprêtait à repartir, elle entendit des chuchotements venant des alentours. En écoutant attentivement, elle se mit en quête de se rapprocher. La chatte pénétra dans un buisson d'aubépines aussi discrètement que possible et put bientôt discerner deux paires de pattes l'une en face de l'autre à à peine une longueur de queue de là. Aussitôt, elle reconnut la voix de sa sœur : Plume d'Aigue-Marine.
« Écoute Cœur de Saule, je ne veux plus te voir d'accord ? Je veux que tu me laisses seule.
- Mais pourquoi ? Je pensais que notre amour valait plus que tout pour toi. Tu me l'as dit... »
Il y eut un silence. Comme s'il avait repéré l'odeur de la chatte. Fleur Sauvage se retint presque de respirer pour ne pas trahir sa présence. Puis le matou souffla.
« Tu sais, j'ai appris pour tes chatons... Ils sont de moi n'est ce pas ? »
Plume d'Aigue-Marine ne répondit pas, la queue enroulée autour de ses pattes blanches et la tête basse. Fleur Sauvage put même percevoir ses membres trembler.
« Eh... chuchota le matou en collant sa tête contre la sienne. Tu peux tout me dire maintenant, nous sommes ensemble. »
Après un instant où le chat noir passa son museau dans la fourrure épaisse du cou de Plume d'Aigue-Marine, elle frémit. La femelle hésita puis commença à murmurer...
« Il y en avait deux... Deux chatons, si petits. Je les avait appelé Patte de Grenouille et Petite Moustache. Si tu les avais vu. Ils étaient ton portrait craché... Soudain, la chatte plia les oreilles. Chaque mots lui coûtait énormément et embrumait ses yeux. J'ai désobéis au code du guerrier. Le Clan des Étoiles m'a punie en me prenant ce que j'avais de plus cher au monde... Ses derniers mots se perdirent dans un son aigu.
- Tout ira bien. ronronna à mi-voix le matou en la serrant contre lui. Je te le promets. »
Fleur Sauvage en avait assez entendu. L'air à la fois dévasté, de tristesse et furieux, elle fit demi-tour. Comment sa sœur pouvait-elle avoir transgressé le Code du Guerrier ? C'était donc ça... Plume d'Aigue-Marine avait eu des chatons avec un chat adverse. Le poil dressé sur sa nuque, Fleur Sauvage se demanda si elle arriverait à lui en parler un jour. Mieux valait garder le secret. La chatte sortit du buisson et secoua son pelage pour en défaire une brindille restée accrochée.
« Fleur Sauvage ? s'étonna Plume d'Aigue-Marine. Qu'est ce que tu fais là ? »